Dans le cadre du programme Europeana 14-18, une campagne de numérisation a mis à l’honneur l’œuvre de Jean Veber (1864-1928) conservée au département des Estampes et de la photographie de la BnF : 120 lithographies, quelques dessins préparatoires à des dessins de presse, et plusieurs planches extraites des journaux auxquels il a collaboré. Azentis a numérisé quelques uns de ces documents.
L’atelier de numérisation installé par Azentis dans les locaux de la BnF apporte une solution à chaque type de documents. Nos photographes sont capables de traiter tour à tour des documents très variés, passant des manuscrits aux estampes en offrant toujours des images de très haute qualité.
Jean Veber était peintre mais c’est surtout pour ses dessins de presse et ses lithographies qu’il est parvenu à la notoriété. Jean Veber se fit connaître également par des dessins dans Le Rire, notamment toute une série sur les Souverains. Dans le numéro 212 du 26 novembre 1898, il illustre un texte de son frère Pierre Veber, pour lequel la BnF possède plusieurs dessins préparatoires récemment acquis.
Parallèlement, il pratique la lithographie et parvient rapidement à une parfaite maitrise de cette technique. Il crée ses premières lithographies en 1893, pour illustrer la partition de Thaïs de Massenet à la demande de l’éditeur Heugel : la BnF possède plusieurs essais pour ces lithographies, la partition originale étant conservée à la Bibliothèque-musée de l’Opéra.
Avant-guerre, il s’illustre dans des scènes de genre, le plus souvent traitées de manière satirique, qui reprennent parfois des peintures, comme L’Arracheuse de dents (1904), Le Philosophe (vers 1907), La correction conjugale (1908). Plusieurs de ces planches ont été éditées par Edmond Sagot. Il aborde des thèmes politiques, notamment à partir de 1904, époque à laquelle il s’équipe d’une presse lithographique. Le Hochet de la République (1904) est la première de ses planches pamphlétaires. Il y dénonce la séparation de l’Église et de l’État figuré sous les traits d’une matrone coiffée du bonnet phrygien serrant dans ses mains un crucifix. Suivront deux lithographies figurant Jaurès. En 1909, paraissent deux représentations célèbres de Clemenceau : dans la première intitulée Le Dompteur, l’homme d’État, le fouet à la main, domine une bête énorme formée par la masse des députés. Dans la 2ème, Le Dompteur a été mangé, l’animal dévore Clemenceau.
Aux armes (1914) est la première des lithographies de la série consacrée à la guerre. Une suite d’estampes de 1914 illustrent les exactions de l’armée prussienne décrites dans les journaux de l’époque : la Mort du Curé de Mayenvic, les Derniers moments d’une jeune fille fusillée en Belgique, L’Assassinat du petit héros au fusil de bois de Magny… Jean Veber se révèle comme un grand dessinateur dramatique, concentrant chaque récit en quelques scènes. Il s’engage à cinquante ans et part pour la Lorraine : son expérience inspire plusieurs planches relatant des scènes de combat, traitées tantôt de manière réaliste (La Cagna, 1914), tantôt de façon allégorique (Sous la mitrailleuse boche, 1916). En septembre 1916, envoyé sur le front de la Somme à Bouchavesnes, il représente les combats dans une scène dramatique (Bouchavesnes, 1916). Il y fait également l’épreuve tragique des gaz qu’il relate dans l’une de ses planches (Les Gaz, 1918). Cette série se termine par deux lithographies : La Croix de guerre (1918), figurant un poilu supplicié sur la croix de guerre se dressant telle la croix du Christ, et l’autre, Guillaume II, montrant l’empereur prussien à genoux dans une mare de sang. Ces œuvres sont de rares témoignages artistiques des combats vus du côté français : Jean Veber y met tout son talent de lithographe pour relater le quotidien tragique du front.
Extrait du texte de Céline Chicha-Castex, département des Estampes et de la photographie sur le blog de Gallica.